Sur-Vivre à Moria/Living in Moria - By Marion Chipeaux

C'est à mon tour aujourd'hui de vous livrer mes premiers sentiments à propos de l'expérience que nous avons tous les trois souhaité vivre en nous rendant sur l'île de Lesbos, à Mytilène, et encore plus précisément dans le camp de Moria, dédié à "l'accueil" des réfugiés.

Je suis arrivée sur place Mercredi soir dernier, le 27 décembre. Dès le lendemain, la journée a commencé par une séance d'information ayant pour but de donner un aperçu de la situation dans le camp, mais également de ce que seraient nos tâches quotidiennes, des différentes missions à accomplir, des règles de sécurité à respecter, etc.

Dès lors, les choses sérieuses ont commencé. Accompagnée de mon binôme (car nous ne sommes jamais seul-e-s lors des missions), je me suis rendue dans le camp de Moria en début d'après-midi. Et là.... quel choc !

Bien que je me sois préparée, autant que l'on puisse le faire avant un tel projet, que ce soit en m'informant au maximum à travers les médias - nous y reviendrons - mais également en consultant les forums dédiés aux témoignages de personnes s'étant déjà elles-mêmes rendues sur place, cela ne fut pas suffisant !

Les conditions de "vie", je dirai plutôt de survie, dans lesquelles se trouvent les personnes à Moria sont juste ABOMINABLES. Ces personnes sont entassées les unes sur les autres. Les plus "chanceuses" ont pour logement une cabane de chantier et sont donc à l'abri des intempéries. Elles sont donc également relativement, je dis bien relativement en sécurité puisque ces cabanes ont une porte qui une fois fermée leur assure un minimum d'intimité et de protection. Mais en ce qui concerne les nombreuses autres personnes, elles n'ont pour logement qu'une simple tente, posée sur des palettes de bois quand il y en a, elles-mêmes posées à même le sol. Je dis quand il y en a puisqu'en cette période hivernale, les gens à Moria sacrifient souvent ces palettes pour pouvoir faire du feu afin d'espérer se réchauffer un peu, ou encore de cuire quelque chose à manger. Elles ont également, grâce aux ONG présentes sur place - ces mêmes ONG qui distribuent les tentes - quelques bâches en plastique pour unique protection contre le vent ou bien la pluie.

Certaines cabanes de chantier accueillent les sanitaires, mais comment vous dire que la plupart d'entre elles ne sont pas éclairées et qu'il n'y a pas toujours d'eau courante. Pouvoir se laver, faire ses besoins, autant de choses que vous faites, que nous faisons tous les jours sans nous poser la moindre question, s'avèrent terriblement compliquées ici.

Les mineurs non accompagnés, les personnes dites vulnérables ou encore les femmes seules bénéficient d'un emplacement particulier, une sorte de camp, à l'intérieur du camp. Ce qui semble de prime abord être le résultat d'une bonne intention n'évite pas pour autant le sentiment d'emprisonnement des personnes installées à cet endroit, un sentiment d'ailleurs assez généralisé à Moria.

De façon générale, les cabanes prévues pour accueillir les personnes sont bien sûr insuffisantes, tenant compte du fait que chaque semaine des centaines de nouveaux arrivants sont enregistrés et que la capacité d'accueil est largement dépassée. A ce jour, plus de 5700 personnes vivent à Moria, un camp initialement prévu pour en accueillir 3000.

Vous pensez peut-être que mon récit est exagéré, mais non, croyez-moi, ce que je vous décris est réel, et ces lignes ne sont encore pas suffisantes pour rendre compte pleinement de la situation ici. Je ne peux malheureusement pas joindre de photos qui illustreraient ce que je vous raconte puisque les autorités n'apprécient pas que l'on en prenne - pas la peine de demander pourquoi! C'est d'ailleurs un des nombreux points du contrat que se doivent de respecter les ONG autorisées à œuvrer à l'intérieur du camp.

Bien que je conçoive que l'afflux d'autant de personnes soit un véritable challenge à relever pour les autorités, il y a tout de même un manque cruel d'investissement sur place, ne serait-ce que pour s'assurer de respecter les besoins et droits fondamentaux auxquels tout être humain devrait pouvoir prétendre.

Marion.

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Today, it's my turn to share initial feelings about the experience we all wanted to live by visiting Lesbos Island, Mytilene, and more specifically, in the camp of Moria, dedicated to "welcoming" refugees.

I arrived last Wednesday evening, December 27th. The next day, the day began with an information session to give an overview of the situation in the camp, but also what would be our daily tasks, different missions to accomplish, safety rules to respect etc.

Since then, the serious things have started. Accompanied by my partner (because we are never alone during missions), I went to Moria in the early afternoon. And once I was there ... what a shock!
Although I had prepared myself, as much as I could do before embarking on such a project, by informing myself as much as possible through media (we will come back to it) but also by consulting forums dedicated to the testimonies of people who were already there, it was not enough!

The conditions of "life", or rather of survival for the people in Moria are just ABOMINABLE. These people are piled on top of each other. The “luckiest” are housed in a cabin and are therefore sheltered from the weather. They are also relatively safe (I say relatively safe because these cabins have doors tht provides them with some minimum of privacy and protection). But for the many other people, their lodging is confined to simple tents, placed on pallets of wood in some cases and placed on the ground. Unfortunately, in this winter, people in Moria often sacrifice these pallets to be able to make fire in the hope to warm themselves up a little, or to cook something to eat. They also have, thanks to the NGOs present on the spot - the same NGOs that distribute the tents - some plastic sheets for some basic protection against the wind or the rain.

Some work huts have toilets, but most of them are not lit and there is not always running water. Being able to wash, to do one's needs, all the things you do, that we do every day without asking ourselves the least, are terribly complicated here.

Unaccompanied minors, vulnerable people or single women enjoy a special location, a kind of camp, inside the camp. What seems to be the result of good intention does not however avoid the feeling of imprisonment of the people living in this place, a feeling quite generalized to Moria.

In general, the cabins planned to accommodate people are of course insufficient, taking into account that each week hundreds of newcomers are registered and that the capacity is largely exceeded. To date, more than 5700 people live in Moria, a camp originally planned to accommodate 3000.

You may think my story is exaggerated, but no, believe me, what I'm describing is real, and these thoughts of mine are still not enough to fully reflect the situation here. I cannot unfortunately add photos that illustrate what I tell you because the authorities do not appreciate that we take - not worth asking why! This is one of the many points in the contract that must be respected by the NGOs authorized to work inside the camp.

Although I understand that the influx of so many people is a real challenge for the authorities, there is still a serious lack of investment on the spot. However, it is imperative that every human being much have the basic needs and rights.

Comments

  1. Quelle horreur... Tu sais si les ONG sur place ont mis à disposition une plateforme par laquelle on peut contribuer pour leur donner plus de moyens? Bon courage pour la suite!

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    1. J'imagine que chacune des organisations présentes sur place peuvent en effet recevoir des donations. Je me renseigne davantage et je reviens vers toi. Mais le problème n est pas vraiment les ONG elles mêmes car elles font vraiment un bon boulot et donnent ce qu elles peuvent. Le problème c'est le camp lui même, les infrastructures, les ordures mêmes ne sont pas ramassées, tout ce que l'on pourrait être pris en charge par la collectivité / municipalité ne l'est pas. Les personnes ici vivent avec des ordures partout autour d'elles. Elles n'ont pas de sac poubelle à disposition et si elles en veulent c'est à elles de les acheter avec la somme ridicule qu'elles reçoivent chaque mois (90 euros pour une personne seule, et pour les familles ou couples, le montant réduit pour chaque nouvelle personne). Bref, autant te dire que les gens ici ont d'autres priorités! C'est désastreux !

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